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Prince du Fleuve Congo
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25 novembre 2011

28 novembre : Tshisekedi, et si nous avions été visités?

Beaucoup d’entre vous n’ont pas arrêté de me demander la raison de mon silence et le manque de mise à jour du Blog du Congolais depuis près de deux ans. De ce silence, trois raisons majeures : la déception, le dégoût et le découragement en sont l’explication.

Déception et dégoût

La déception d’assister à l’impuissance d’une opposition incapable de s’organiser et de constituer une alternative, au pouvoir AMP-PALU-UDEMO, en l’absence de Jean-Pierre Bemba et d’Etienne Tshisekedi; le dégoût de voir des gens élus en 2006 grâce à l’aura du Chairman, retourner sans vergogne leur casaque pour aller à la soupe.

Et le découragement.

Au mois de novembre 2007, je vais couvrir, pour le compte de CongoOne et de Culturek, la cérémonie de lancement de vente de cartes du premier congrès de l’UDPS  http://congomania.afrikblog.com/archives/2007/11/20/6955639.html. Lorsque je vois Tshisekedi et l’UDPS réussir à lever 13.000 dollars, en moins de 30 minutes, dans une parcelle, je me dis  que le rêve congolais tant caressé va finalement se matérialiser.

Mais lorsque plus tard, alors que le sphinx lutte contre la maladie en Europe, je vois  ses collaborateurs se livrer publiquement en spectacle en se disputant l’héritage du vieux, au point de lui arracher des larmes dans une église, je me sens envahi par un paralysant sentiment de découragement. Pas de Bemba, pas de Tshisekedi, pas d’UDPS.

PPRD triomphant : cent ans au Raïs, tomotombele !

L’eau ne coule pas du robinet, le courant électrique a foutu le camp, le salaire du fonctionnaire  a cessé de tomber, les médicaments sont introuvables à Mama Yemo… Mais, ce n’est pas ça qui peut empêcher Kabila de dormir. Le bilan, c’est indiscutable, on en est très loin du compte. Mais, tout de même, Il en faut quand même deux pour aller à la compétition. Or, en face, il n’y a personne.  Aussi, est-ce tout à fait logiquement que le PPRD, rentrant triomphant trois ans plus tard de son université d’été de Kisangani, déclare,  face à une opposition laminée, être en mesure de faire passer, sans alliances, Kabila au premier tour de l’élection présidentielle de 2011.

Le sphinx, un phœnix qui renaît de ses cendres

Seulement, le Te Deum de la majorité est entonné un peu trop précipitamment. Peut-être qu’enivrés par le  pouvoir et le spectacle de l’UDPS, ils en sont arrivés à oublier le nombre de fois où il avait été dit de Tshisekedi : ‘‘Cette fois-ci, ça en est fini de lui’’. Comme à chaque fois, contre toute attente, même contre la maladie et le poids de l’âge, l’homme de Limete réussit à rebondir d’une façon qui  laisse la majorité sans voix. Son retour triomphal de décembre 2010 pousse la peur et l’assurance à s’échanger de domiciles. Tel un  chiffon quelconque, la constitution se fait amender dare-dare, par un parlement de parade, pour éviter à Kabila un deuxième tour dont il ne se fait pas la moindre illusion sur l’issue face à Tshisekedi.

 

Et si nous avions été visités ?  

Dans la force de l’âge, du haut de mes 44 ans, lorsque je reviens du Bas Congo, et même du Plateau de Bateke seulement, je suis bon pour un bain et pour le lit. Il ne faut surtout pas venir me demander d’aller rendre une visite de courtoisie  à un ami de quartier. Instinctivement, sous la l’emprise de la fatigue, mon corps vous répondra nooon!

Mais de voir un vieux de presque 80 ans, faire un voyage de plus de huit heures, et réussir, malgré la fatigue et le changement de climat, à rester debout dans une jeep pendant le même temps, pour  finalement trouver la force de parler pendant plus de 30 minutes à plus de cent mille personnes, j’en reste perplexe.

Voir cet homme faire tout le Congo en deux semaines, soulever tant d’espérance et de confiance d’innombrables foules de Bunia à Bandundu, en passant par Beni, Butembo, Goma, Mbuji Mayi et Kananga; voir, à Kisangani, un orphelin montrer en pleurant la tombe de son père à un homme sans force coercitive et lui demander réparation; voir encore à Kisangani, un perclus de pieds ramper avec l’énergie du désespoir au milieu des valides et paraître comme transfiguré quand il réussit à serrer la main de Tshisekedi; je me dis que je dois être en train d’observer une scène dont quelque chose, quelque chose d’essentiel, la clé, m’échappe.

Et des questions dans ma tête se bousculent. Qui est-il, cet homme? Que veut-il? Où va-t-il? Par quoi est-il mû?

Comment fait-on pour ne pas abandonner la lutte quand on est à chaque fois arrêté, bastonné, relégué loin de tout aux quatre coins du Congo?  Comment fait-on, en pleine dictature féroce, pour débarquer de l’avion, la cravate au vent, aller sur Pont Kasavubu, tenir un meeting devant une foule impressionnante? Alors que les sollicitations ne manquent pas, comment fait-on pour ne pas céder à la tentation de prendre les armes et renverser, par la force, des pouvoirs impopulaires et affameurs?

Et encore des questions. Comment fait-on, alors qu’on n’a pas les instruments du pouvoir, pour démonétiser une monnaie régulièrement frappée? Comment fait-on, sans armes, pour résister pacifiquement à la dictature, en paralysant la capitale et le pays, par des opérations villes mortes? Comment fait-on, sans injecter des devises étrangères sur le marché, pour faire chuter la cote de change du dollar et baisser les prix des denrées sur le marché, à chaque fois qu’un retour aux affaires est pressenti? Comment fait-on, alors qu’on est relégué à Mumpompa, pour ramener le suffisant Mzee Kabila à négocier pour assurer la réussite du lancement de son franc congolais ?

Tout homme, disait Mobutu, tout homme à un prix. Tout homme politique aussi, surtout congolais, vendrait père et mère, tuerait fils et fille, pour le pouvoir. Comment fait-on pour être seul à être si regardant pour exiger à chaque fois un cadre normal de l’exercice du pouvoir, alors que celui-ci est offert sur un plateau d’argent? Comment fait-on pour ne pas mener l’opposition à la congolaise : vilipender Mobutu de jour, et de nuit, aller chercher ses sacs et malles d’argent auprès de Tshimbombo et Vunduawe, au point de faire jurer plus tard à ce dernier : ‘‘Tous venaient, une fois la nuit tombée, sauf, je me dois à la vérité, Tshisekedi’’.     

Serions-nous des Sud-Africains pour en arriver à cristalliser nos espérances sur un homme vieux, physiquement diminué, marchant d’un pas visiblement mal assuré? Humblement, en dépit de la justesse de mes analyses et malgré ma perspicacité par vous reconnues, je dois vous avouer qu’à toutes ces questions, je n’ai aucune réponse.     

Aussi, ne puis-je que vous servir la réponse qu’il donne lui-même en Belgique à un journaliste qui lui demande le secret de sa résistance physique : ‘’Je téléphone à Dieu’’.          

Quand j’ai entendu cette réponse, je n’ai pas pu m’empêcher de  l’appliquer à  chacune des questions ci-dessus et de reconnaître que si cet homme est différent de nous tous, et surtout de ses  pairs, les opérateurs politiques, c’est parce que de temps en temps, pour nous étonner tant, il téléphone à Dieu.

Nous avons l’or, nous avons le diamant, nous avons le coltan, nous avons la foret, nous avons l’eau, nous avons Inga… Mais nous avons faim, nous n’avons pas d’école, nous n’avons pas de bourse, nous n’avons pas de boulot, nous n’avons pas d’électricité, nous n’avons pas de route, et quand il nous arrive d’en avoir une, le chinois nous la vend à 12 million de dollars le kilomètre. Et pendant que les 5 chantiers sont résolument en marche et que le PNUD n’arrête pas de nous jeter des fleurs, il nous apprend, le même PNUD, brutalement, que nous sommes le dernier classé sur 187 pays, par rapport au développement.

Sûrement que tout ce long papier rédigé à la hâte et certainement plein de coquilles est discutable. Mais deux choses sont absolument certaines : de toutes mes longues 10 années passées à l’université pour décrocher le grade de licence, je n’ai touché ma bourse, alors que j’y avais pleinement droit, que pendant trois malheureux mois, soit d’août à novembre 1992. Et curieuse coïncidence, le premier ministre à l’époque s’appelait Etienne Tshisekedi. Avant et après lui, les autres s’en fichaient éperdument. Je me dis maintenant que peut-être que Tshisekedi avait téléphoné à Dieu et que Dieu lui avait dit que je représentais l’avenir du Congo.

Dites-vous qu’aujourd’hui encore, à un politicien qui lui fait un bigo, Dieu peut lui répondre en lui montrant la voie, en lui donnant le vouloir et la force, pour faire redevenir le Congo ce qu’il avait été et ce qu’il doit être : le pays où il fait beau vivre.

Ne soyons pas fatalistes, allons tous voter, et votons tous le n° 11, pour toutes les qualités sus évoquées, mais surtout parce que …il téléphone à Dieu.

Et comment rattraperions-nous l’opportunité ratée, si pendant tout ce temps, nous avions été visités?   

 

Tony Katombe

 

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