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Prince du Fleuve Congo
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20 juillet 2006

Resistance! Vue de Kin

Résistance civile : savoir interpréter les signes des temps.

Kinshasa, boulevard du 30 juin, mardi 11 juillet 2006. La police congolaise, formée et équipée par l’Union Européenne, s’est déchaînée contre les 19 candidats à l’élection présidentielle du 30 juillet et les manifestants du Front pour

la Défense

du Congo (FDC) conduits par l’Union pour

la Démocratie

et le Progrès Social (UDPS).

En effet, la police a réprimé les manifestants, avec sa brutalité légendaire, au moyen du gaz lacrymogène, des balles réelles et des grenades d’assaut dont l’une a arraché les mains du manifestant Didier BONGEYA qui a attrapé la grenade lui lancée au vol pour la renvoyer à l’expéditeur. Il a été déploré beaucoup de blessés graves dont le député Franck DIONGO, proche du Docteur Etienne TSHISEKEDI. Plusieurs personnes, dont des journalistes, ont été étouffées et intoxiquées par le gaz.

La police, comme à sa fâcheuse habitude, a invoqué le défaut d’autorisation pour justifier cette répression disproportionnée. Pour une fois, le Comité International d’Accompagnement de

la Transition

(CIAT), dont les Congolais garderont à jamais un désagréable souvenir, s’est départi de sa partialité coutumière pour condamner cette barbarie d’un autre âge en rappelant aux autorités congolaises les termes de la constitution et de la circulaire du ministre (pourtant PPRD) de l’intérieur consacrant la légalité des manifestations pacifiques qui ne devraient plus souffrir d’autorisation, laquelle autorisation n’étant généralement jamais accordée.

Bis repetita ! Kinshasa, boulevard du 30 juin, avenue Président Kasa-vubu, mardi 18 juillet. L’UDPS est revenue à la charge avec une autre marche gigantesque. Au passage, les manifestants s’étant improvisés agents commis à la salubrité de l’Hôtel de ville de Kinshasa, ont décrété une opération ‘‘ville propre’’ en arrachant et brûlant les banderoles et affiches de propagande des candidats aux élections présidentielle et législative. Les banderoles et affiches, aux dires des manifestants, rendaient sale la ville de Kinshasa.

L’objectif de ces nombreuses marches initiées par les forces du changement est clair : requalifier le processus électoral en le rendant plus crédible, plus égalitaire et plus inclusif. En clair, l’UDPS et alliés veulent se rassurer que tous les candidats ont le même degré de contrôle des rouages de

la Commission Electorale

Indépendante (CEI) qui a connu jusqu’ici le désaveu de toutes les composantes, sauf d’une seule, avec laquelle elle est en troublante symbiose depuis le début du processus. L’UDPS veut surtout être impliquée dans le processus afin de participer aux élections qui du reste sont voulues inclusives pour être porteuses de paix et de légitimité des dirigeants qui en seront issus.

Cet engagement de l’UDPS et alliés pour un processus plus crédible et plus inclusif est perçu favorablement par toutes les parties en présence, en l’exception de deux : le PPRD, parti du président congolais sortant, et la communauté internationale. Le PPRD, dans un discours d’intoxication et de manipulation dont il a seul le secret, rejette toute concertation visant la crédibilisation du processus, au motif qu’elle prolongerait la transition. C’est le comble du ridicule quand on sait que la transition est entrée automatiquement dans une nouvelle phase de prolongation depuis le 30 juin 2006, faute d’installation de nouvelles institutions issues des élections qui devaient être tenues avant cette date.

Avant le 30 juin, les observateurs ont vu, incrédules, les bonzes du PPRD et de

la CODEK

se relayer à la télévision et demander au peuple de ne pas manifester parce que c’était une prolongation de … ‘‘juste un tout petit mois’’. Décembre 2005, pourtant, le PPRD avait pris la tête de la croisade pro actuelle constitution avec comme argument fondamental, la possibilité de tenue des élections avant le 30 juin 2006, parce que c’était la fin légale de la transition.

Le PPRD ne trouve rien à redire qu’une simple structure technique sans droit ni qualité, usurpe le pouvoir des composantes et entités, seuls sujets de droit au Dialogue Intercongolais (DIC), pour fixer de manière unilatérale un calendrier qui va au-delà de la période de transition. Les bonnes consciences sont heurtées par cette volonté d’induire le peuple en erreur de la part du PPRD qui sait bien que

la CEI

n’a pas le droit de fixer un calendrier qui déborde de la période de transition ne serait-ce que d’un seul malheureux jour.

Et là où le PPRD révolte les rares congolais qui ont encore les nerfs solides pour regarder leurs shows télévisé, c’est quand on sait que ‘‘ce tout petit mois’’ dont on parle ne concerne que les élections présidentielle et législative, le calendrier pour les provinciales, les locales et le deuxième tour de la présidentielle, n’étant pas encore fixé par

la CEI.

Quand

on devine aisément que tout ce processus ne peut raisonnablement pas être achevé avant janvier 2007, on ne peut que se révolter devant un tel mépris de la part des bonzes du PPRD qui veulent jouer les borgnes au pays des aveugles, en déclarant blanc ce qui est indiscutablement noir.

La deuxième partie qui ne veut pas entendre parler de la requalification du processus électoral est, comme affirmé plus haut, la fameuse communauté internationale représentée par MM W.L. SWING et L. MICHEL. Dans ses nombreux rapports au conseil de sécurité et dans ses nombreuses prestations radiotélévisées, SWING ne rate pas une occasion pour clamer que toutes les conditions sont réunies pour la tenue des élections crédibles. Ce que MICHEL est loin de contredire. Pour ce dernier, non seulement tout va bien comme dans le meilleur des mondes, mais cerise sur le gâteau, il a même sa petite idée sur le futur président de sa ‘‘colonie’’ qu’il présente comme ‘‘l’espoir du Congo’’.   

Les observateurs ne sont pas surpris par l’attitude de la communauté internationale et plus particulièrement de

la Belgique

dont les principaux ministres ne s’embarrassant plus de réserves diplomatiques,  ont exacerbé les congolais par leurs  incessants va et vient à Kinshasa juste pour tapoter les épaules de leur candidat. Attitude qui renforce l’impression des congolais que  ledit candidat est déjà désigné vainqueur avant scrutin par l’occident. Impression relayée par Carlo de FILIPI dans son rapport confidentiel du 30 mai 2006.

Poussant le néocolonialisme jusqu’à la caricature, Mr. A. de DECKER, ministre belge de la coopération, ne vient-il pas de jeter l’anathème sur les forces du changement qui réclament des concertations pour un processus électoral crédible, concerté et inclusif, en les  traitant ‘‘d’ ennemis de la démocratie’’? N’est-il pas fait mention des pressions tout azimuts exercées par

la France

et

la Grande-Bretagne

sur MBUSA NYAMUSI, candidat président de la république et leader du RCD-K-ML, très populaire au Nord-Kivu, de jeter l’éponge au profit de cet oiseau rare qui a tout l’air de sécuriser plus les intérêts occidentaux que congolais ? 

Face à ce mouvement de résistance qui s’intensifie tant au pays qu’à l’étranger, la stratégie du PPRD et de la communauté internationale est toute simple : laisser l’UDPS et Alliés manifester tout leur soul, mais ignorer superbement leurs revendications en gardant le cap vers ces élections des autres. Si des élections ont pu être tenues en Irak, entend-on argumenter par les jusqu’au-boutistes des élections prêts-à-porter, elles le seront bien au Congo.   

L’Itruri peut continuer à brûler, les Interamwe, les Nkunda et Mutebusi, les Maï-Maï … peuvent continuer à imposer leur règne au Kivu et au Nord Katanga. La situation est dite sous contrôle tant que l’EUFOR et la redoutable police nationale tiennent Kinshasa en joue pour y installer le président désigné d’avance dans les salons politiques méditerranéens.

Le précieux rapport confidentiel de Mr Carlo de FILIPI, qui reconnaît la pertinence et la justesse de la résistance congolaise, est là pour ôter à la communauté internationale les prétextes de xénophobie et d’intégrisme qu’elle ressasse à loisir face aux revendications des forces du changement pour un processus électoral où tous les congolais ont voix au chapitre. Toute continuité, de la part de la communauté internationale, dans l’approche électorale présente ne peut être perçue autrement par les congolais que comme du mépris.

Personne, même dans cette communauté internationale qui croit avoir réponse à tout, n’est assez malin pour prévoir la réaction d’un peuple lorsqu’il se convainc d’avoir un sort scellé d’avance par le mépris de ceux qui s’estiment sortis de la cuisse de Jupiter. C’est une chose de déplorer aujourd’hui le terrorisme arabe et islamique. Une autre est de se poser la question fondamentale de savoir ce qui a pu pousser ces citoyens du monde à se couvrir de bombe, à détourner des avions pour tuer en se tuant.  Tant que l’occident croira avoir toutes les réponses, il parlera d’intégrisme là-bas et de xénophobie ici, et continuera de gaspiller pour combattre de fausses causes, des sommes colossales qui auraient pu éradiquer la pauvreté, la famine et plusieurs maladies de la surface de la terre si elles avaient été investies et utilisées plus humainement ?   

Dans l’indifférence et le mépris, préoccupant pourtant, les signes du pourrissement et de radicalisation foisonnent.

A Bruxelles, à Londres, à New York, à Tel-Aviv, … des marches gigantesques sont organisées, avec comme points de chutes les ambassades du Congo et de l’UE, par des congolais de la diaspora qui, bien qu’exclus du processus pour on ne comprend pas très bien quelle raison technique, n’entendent pas moins dénoncer ces élections qui n’arrangent qu’une composante et la communauté internationale. Paris, mercredi 19 juillet 2006, l’ambassade du Congo est ‘‘libérée’’ par les activistes de l'UDPS, APARECO, TOPONI CONGO, BANA CONGO... qui entendent y passer une agréable nuit, en dépit du risque élevé d’expulsion sur le Congo, d’un Sarko très en phase avec Kinshasa.

Au Congo, des manifestants rentrent sur le boulevard du 30 juin une semaine après y avoir fait couler leur sang, après y avoir laissé leur vie, leurs doigts, leurs oreilles, dans la répression barbare d’une police dite nationale. Explication : fanatiques ? Ennemis d’une démocratie dessinée outre méditerranée ?   Des manifestants marchent nus – ce qui est très loin d’être encouragé - à Kinshasa. Explication encore : vandales ? Impudiques ?

SWING qui se dit connaître le Kinois, doit savoir que ce dernier n’a pas de culture nudiste, mais préfère au contraire, tant qu’il est réduit à choisir, plutôt frimer ventre vide que mal sapé. Car pour le Kinois, sans la sape, la vie est inconcevable, invivable. SWING qui est loin d’être nul en psychologie doit très facilement comprendre que ce Kinois qui se débarrasse de la sape sur le boulevard doit être arrivé à la conclusion que seules les voies du désespoir seront entendues. SWING doit aussi très aisément comprendre que le point de non retour dans cette âme méprisée doit avoir franchi son point de non retour et que désormais le recours aux voix du désespoir ne se fera que croissant de la part de ceux qui ont abdiqué de vivre avec la honte du mépris.

Il ne restera qu’à trouver un nom à l’escalade de la lutte de ceux qui auront refusé la condition de sous-hommes et de la combattre avec un budget conséquent. Des vies seront encore fauchées, des mains et oreilles arrachées. Et des voix s’élèveront encore pour dénoncer le mépris. Et le cycle continuera.

Anthony MK KATOMBE

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