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Prince du Fleuve Congo
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16 juin 2006

Galvaudage lexical : le nouveau filon congolais.

Par Anthony Katombe

Le Congo, on le sait, est un scandale humanitaire avec plus de 4.000.000 des morts, des millions de déplacés, des centaines des villages brûlés, de millions de femmes violées,…de suite de la guerre business injustement lui imposée par la communauté affairiste internationale. Mais le Congo, c’est avant tout un scandale géologique. Ce continent de pays, aux dires des connaisseurs, remplit à lui seul, tout le tableau de Mendeleïev. D’où l’intérêt des étrangers de tous les horizons pour cette terre bénie de Dieu, intérêt bien compréhensible et tout à fait acceptable, si toutefois, on aimait autant les habitants du Congo comme on aime son sol et son sous-sol.

Qu’à cela ne tienne ! Le Congo est finalement un scandale en tout. Le dernier scandale en date est l’enrichissement que peut procurer le simple fait de parler beaucoup, d’utiliser les mots à tort et à travers. Quiconque veut faire rapidement fortune sans rien dépenser en retour n’a qu’à débarquer au Congo. Tout ce qu’on lui demande ici c’est d’avoir des mots, des expressions, pas d’en créer, mais d’en sortir le plus possible pour chaque occasion. Et surtout d’en galvauder le sens. Qui langue a au Congo va ! Le nouvel eldorado congolais est né : c’est le galvaudage lexical. Il suffit juste d’altérer le sens des mots, d’en abuser, de les utiliser dans un contexte tout à fait inapproprié, et le lendemain, on se réveille plein aux as.

Tenez,  un congolais, au langage ordurier connu de tous, propriétaire d’un site édité à partir du Canada, favorable au président congolais sortant et à sa famille politique, s’est fait une liste des ‘‘traîtres de la république’’ parmi lesquels se trouvent repris les noms de toutes les figures emblématiques du changement, dont Tshisekedi en tête. Ce cher éditeur a été signalé tout dernièrement à Kinshasa  d’où il serait reparti avec des poches bien remplies après un porte-à-porte fructueux auprès de tous ceux qui bénéficient de ses services.

Tenez encore, une obscure ‘‘Union des Congolais pour la Défense de la Patrie’’ qui a fait son apparition il y a quelques semaines sur Internet, couvre aussi d’injures tous ceux qui n’épousent pas les vues du PPRD et qui se posent des questions sur le passé et les origines du président de la république sortant.

La stratégie de ces ‘‘chercheurs d’or’’ d’un genre nouveau est toute simple : cirez les bottes du président sortant et de ces lieutenants, inversez les rôles, galvauder les mots et les expressions dans un discours ordurier.

Ainsi se décernent-ils la médaille de ‘‘défenseurs de la patrie’’ et qualifient-ils les combattants de la liberté de ‘‘traîtres’’. On veut bien les croire, mais seulement on veut d’abord qu’ils nous disent de quel pays ils sont les défenseurs et contre qui le défendent-ils. Si ce pays est le Congo, ils devraient aller rigoler ailleurs. Ceux qu’ils soutiennent dans leurs messages nous ont racontés hier que ce sont les occidentaux qui ont fait tuer Mzee Kabila qui lui, défendait la patrie. Mzee, nous fut-il dit, gênait les intérêts des impérialistes et paya de sa vie son opposition au diktat occidental. Ceux qu’ils soutiennent ont fait de Mzee un héros national au même titre que Lumumba qui était mort pour la défense de la patrie. Ceux qu’ils soutiennent, alors qu’ils avaient juré à Mzee de ne jamais trahir le Congo, demandent aujourd’hui, même pour respirer, la permission de Michel, celui-là même qui avait été le premier à annoncer la ‘‘bonne nouvelle’’ de la mort de Mzee !

De deux choses l’une : ou Mzee (qui n’était pas le leader idéal, loin s’en faut !) avait raison d’exiger, comme Lumumba, que l’histoire du Congo s’écrive au Congo par les Congolais eux-mêmes, dans ce cas, ceux qui continuent à se réclamer de lui, en bon ‘‘conglomérat d’aventuriers et d’opportunistes’’, l’ont trahi ; ou alors Mzee ne se livrait qu’à un show de mauvais goût qui a raflé la vie à plus de 4.000.000 des Congolais, auquel cas ceux qui se réclament de lui doivent être poursuivis pour association des malfaiteurs, crime contre l’humanité et génocide.

De quelle patrie parlent-ils ? De qui la défendent-ils ? Leurs bienfaiteurs se la coulent douce avec les charognards de l'affairiste communauté internationale et eux, qui participent à cette agape de nos malheurs, nous rabattent les oreilles avec des termes galvaudés et des rôles inversés. N'ont-ils jamais appris qu'on ne parle pas la bouche pleine ? Fair-play, nous leur souhaitons  un bon appétit, tout en les prévenant  que leur bouffe leur sortira par le nez, car la fête va bientôt se terminer.

Des galvaudeurs, on en trouve surtout parmi le personnel diplomatique occidental. Pour s’en convaincre, tous les Congolais, qui comme Carlo De Filipi, osent questionner le processus électoral, sont traités d’extrémistes. Et lorsqu’ils se posent des questions sur les origines de ceux qui s’apprêtent à leur demander leur suffrage, la diplomatie occidentale trouve tout de suite un nouveau concept : ‘‘congolité’’, et qualifie la campagne pour l’éveil de conscience de xénophobie. Xénophobie ! Dans un pays où les habitants se font bastonner par leur propre police payée avec l’argent de leur poche quand ils protestent contre les mauvaises et humiliantes conditions de travail leur imposées par les Libanais, les Pakistanais, les Indiens, les Chinois, les Européens,…qui s’y comportent comme en terrain conquis. Le pays qui a recueilli des millions des ruandais, les a hébergés, nourris, éduqués !

Des étrangers se permettent tout au Congo. Ils vont jusqu’à gifler nos femmes qui travaillent pour eux sans que nous lancions le moindre appel à la haine. Un Ruandais, aujourd’hui chef d’état-major chez-lui, se moque de nous à Kigali, seulement parce que nous l’avons accepté comme chef d’état-major chez-nous à Kinshasa. Et quand nous voulons nous assurer que quelqu’un d’autre ne se moque pas de nous demain à partir de Kampala, Kigali ou Dar Es-Salaam, nous devenons xénophobes !!!

Les nôtres, en instance de refoulement sur le Congo, sont parquées comme du bétail en Belgique, en France, en Amérique, juste parce qu’ils fuient des conditions de vie infrahumaines au pays, conditions créées et entretenues par une classe dirigeante incompétente et prédatrice. Et même lorsqu’ils sont des réfugiés politiques, il est renié aux nôtres ce qu’on reconnaît pourtant humainement aux autres. Jacques Matanda ne vient-il pas de passer de longs mois en prison pour ‘‘séjour irrégulier’’ sur le sol américain ?

Nous, nous nous plions à leurs lois, et nous n’avons pas le droit d’exiger qu’on se plie aux nôtres ? On va jusqu’à nous imposer des sujets de campagne chez-nous à cause de quelques malheureux millions de dollars ‘‘placés’’ dans la CEI ! A nous, on refuse le simple droit de résidence et on voudrait que nous cédions aux étrangers jusqu’aux droits politiques. Et quand nous revendiquons, la presse belge parle de campagne anti-belge ! Nous voulons bien aimer les Belges, ils savent à quel point nous sommes fous d’eux. Mais eux, nous ont-ils jamais aimés ? Croient-ils en nous au point que nous continuions à les aimer, même si après plus d’un siècle de cohabitation, ils ont démontré plus d’amour pour la terre que pour ses habitants ?

Et parce que tout le monde joue au petit malin en nous lançant toutes sortes de qualificatifs au visage, sera-ce de l’exagération si à notre tour nous qualifions pareille attitude de la part de la presse et de ces fonctionnaires diplomatiques occidentaux de racisme ?

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